Illustration moderne d’un dossier d’assurance sécurisé sous le RGPD, cadenas numérique et fichiers confidentiels protégés par la CNIL, fond institutionnel bleu clair

Protection des données en assurance : vos droits et les obligations des assureurs

Lorsqu’on souscrit une assurance emprunteur, une assurance santé ou tout autre contrat, on transmet des informations personnelles particulièrement sensibles. Données médicales, revenus, adresse, situation familiale… Ces éléments circulent entre différents acteurs : assureurs, courtiers, banques, parfois réassureurs. Mais qu’en est-il vraiment de leur protection ? Vos informations sont-elles réellement en sécurité, et quels sont vos droits face à leur utilisation ?

Depuis l’entrée en vigueur du RGPD en 2018, les règles ont considérablement évolué. Les compagnies d’assurance ont des obligations strictes, et les assurés disposent de droits précis pour contrôler l’usage de leurs données. Voici ce que vous devez savoir pour comprendre ce cadre juridique et agir en toute connaissance de cause.

En bref
– Les assureurs collectent vos données pour évaluer les risques, fixer les tarifs et gérer les sinistres, mais doivent respecter le RGPD et la loi Informatique & Libertés.
– Vous disposez de plusieurs droits : accès, rectification, effacement, opposition et portabilité de vos données personnelles.
– En cas de manquement, vous pouvez saisir le délégué à la protection des données (DPO) de votre assureur, puis la CNIL, voire engager une action en justice.
– La confidentialité des données médicales est renforcée par le secret professionnel et des règles de conservation strictes.

Pourquoi les assureurs collectent vos données personnelles

Avant même de comprendre comment vos données sont protégées, il est utile de savoir pourquoi les compagnies d’assurance en ont besoin. Les informations collectées ne sont pas anodines : identité complète, coordonnées, situation professionnelle, revenus, historique médical, antécédents familiaux, habitudes de vie… La liste peut sembler intrusive, mais elle répond à des finalités précises et encadrées par la loi.

Évaluation du risque et tarification personnalisée. Pour fixer le montant de votre prime, l’assureur doit analyser votre profil de risque. Dans le cadre d’une assurance emprunteur, cela passe notamment par l’étude de votre état de santé, de votre âge, de votre profession ou encore de vos antécédents médicaux. Ces éléments permettent de déterminer si vous présentez un risque aggravé, et donc d’ajuster les conditions du contrat.

Gestion des contrats et des sinistres. Une fois le contrat en place, l’assureur doit pouvoir vous contacter, gérer vos demandes de prise en charge, analyser les déclarations de sinistre et vérifier la conformité des dossiers. Ces traitements nécessitent l’accès à vos données, parfois sur plusieurs années.

Prévention de la fraude. Les compagnies utilisent également vos informations pour détecter d’éventuelles fraudes, par exemple en croisant des déclarations incohérentes ou en identifiant des comportements suspects. Ce traitement, bien qu’encadré, permet de protéger l’ensemble des assurés contre les abus qui peuvent faire augmenter les primes.

En clair, chaque donnée collectée doit répondre à un objectif légitime. L’assureur ne peut pas vous demander n’importe quelle information sous prétexte d’améliorer son service. Le principe de minimisation impose de ne collecter que ce qui est strictement nécessaire à la finalité poursuivie.

Le cadre juridique de la protection des données en assurance

Représentation visuelle du cadre juridique de la protection des données en assurance : RGPD, CNIL et Code des assurances reliés par un réseau sécurisé

La protection de vos données personnelles repose sur un arsenal législatif solide, construit autour de trois piliers principaux : le Règlement général sur la protection des données (RGPD), la loi Informatique & Libertés et le Code des assurances.

Le RGPD, pierre angulaire de la protection des données

Applicable depuis le 25 mai 2018, le RGPD (Règlement UE 2016/679) est un texte européen qui s’impose à toutes les entreprises traitant des données personnelles de résidents de l’Union européenne. Les assureurs, en tant que responsables de traitement, doivent se conformer à des obligations strictes : licéité du traitement, transparence, limitation des finalités, exactitude des données, durée de conservation limitée, sécurité et confidentialité.

Concrètement, cela signifie que votre assureur doit vous informer clairement de l’usage qui sera fait de vos informations, obtenir votre consentement lorsque c’est nécessaire, et mettre en place des mesures techniques et organisationnelles pour éviter les fuites de données ou les accès non autorisés.

La loi Informatique & Libertés, socle français

Modifiée en 2018 pour s’aligner sur le RGPD, la loi Informatique & Libertés du 6 janvier 1978 complète le cadre européen en précisant certaines spécificités françaises. Elle confie à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) le rôle de veiller au respect de ces règles et de sanctionner les manquements.

Les assureurs doivent par exemple désigner un délégué à la protection des données (DPO) chargé de veiller à la conformité des traitements et de répondre aux demandes des assurés concernant leurs données. Ce DPO est votre interlocuteur privilégié en cas de question ou de litige.

Le Code des assurances et le secret professionnel

Le Code des assurances impose aux compagnies et à leurs intermédiaires une obligation de secret professionnel, notamment concernant les données médicales. Ces informations ne peuvent être partagées qu’avec des personnes strictement habilitées, comme le médecin-conseil de l’assureur, et ne doivent jamais être transmises à des tiers sans votre accord explicite.

En pratique, lors de la souscription d’une assurance emprunteur sans questionnaire médical (dans le cadre de la loi Lemoine), les données de santé ne sont même plus collectées si le capital emprunté est inférieur à 200 000 euros par assuré et que le prêt se termine avant vos 60 ans. Cette évolution marque une avancée significative en matière de protection de la vie privée.

Vos droits en tant qu’assuré

Le RGPD vous confère des droits concrets et opposables. Vous n’êtes pas un simple utilisateur passif : vous avez la possibilité d’exercer un contrôle réel sur vos informations personnelles.

Droit d’accès et de rectification

Vous pouvez à tout moment demander à votre assureur de vous communiquer l’ensemble des données qu’il détient sur vous : identité, coordonnées, historique de contrats, données médicales, correspondances, etc. Cette demande doit être satisfaite sous un mois, gratuitement, sauf abus manifeste.

Si vous constatez une erreur, une information obsolète ou incomplète, vous avez le droit d’en demander la rectification. Par exemple, si votre adresse n’est plus à jour ou si une donnée médicale a été mal renseignée, l’assureur doit corriger le fichier dans les meilleurs délais. Ce droit est essentiel pour garantir l’exactitude des informations utilisées pour évaluer votre profil ou gérer vos garanties d’assurance.

Droit à l’effacement, ou « droit à l’oubli »

Dans certaines situations, vous pouvez demander la suppression de vos données personnelles. Ce droit s’applique notamment lorsque les informations ne sont plus nécessaires au regard des finalités pour lesquelles elles ont été collectées, ou si vous retirez votre consentement à leur traitement.

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Attention toutefois : l’assureur peut refuser cette demande si la conservation des données est nécessaire pour respecter une obligation légale (par exemple, l’obligation de conserver les dossiers sinistres pendant 10 ans) ou pour constater, exercer ou défendre des droits en justice. En matière d’assurance emprunteur, le droit à l’oubli s’applique également dans un contexte spécifique lié aux antécédents médicaux graves, notamment pour les anciens malades du cancer.

Droit d’opposition

Vous pouvez vous opposer à certains traitements de vos données, notamment lorsqu’ils sont utilisés à des fins de prospection commerciale. Si vous ne souhaitez plus recevoir d’offres personnalisées ou de sollicitations de votre assureur, il vous suffit de manifester votre opposition, et l’entreprise doit cesser immédiatement ce type de traitement.

Ce droit ne s’applique pas lorsque le traitement est nécessaire à l’exécution du contrat ou au respect d’une obligation légale. Par exemple, vous ne pouvez pas vous opposer à ce que votre assureur conserve vos données pour gérer les sinistres en cours.

Droit à la portabilité

Depuis le RGPD, vous avez également le droit de récupérer vos données dans un format structuré, couramment utilisé et lisible par machine, afin de les transmettre à un autre organisme. Ce droit facilite la délégation d’assurance emprunteur ou le changement d’assureur en simplifiant le transfert de vos informations.

Comment exercer ces droits en pratique

Pour faire valoir vos droits, commencez par contacter le délégué à la protection des données (DPO) de votre compagnie d’assurance. Ses coordonnées doivent figurer dans les conditions générales de votre contrat ou sur le site internet de l’assureur. Votre demande peut être formulée par courrier postal, par email ou via un formulaire en ligne.

Soyez précis dans votre demande : indiquez clairement le droit que vous souhaitez exercer (accès, rectification, effacement, etc.) et joignez une copie de votre pièce d’identité pour éviter tout risque d’usurpation. L’assureur dispose d’un mois pour vous répondre. En l’absence de réponse ou en cas de refus que vous jugez injustifié, vous pouvez saisir la CNIL.

Les obligations des assureurs

Les compagnies d’assurance ne sont pas libres de faire ce qu’elles veulent avec vos données. Elles doivent respecter des règles strictes, sous peine de sanctions financières lourdes.

Consentement explicite et information transparente

Avant de collecter vos données, l’assureur doit vous informer de manière claire et compréhensible des finalités du traitement, de la durée de conservation, de vos droits et des destinataires potentiels de vos informations. Cette information doit être accessible, idéalement dans une notice dédiée ou dans les conditions générales du contrat.

Pour certains traitements, notamment ceux relatifs aux données sensibles (santé, opinions politiques, orientation sexuelle), le consentement doit être recueilli de manière explicite. Dans le cadre d’une assurance emprunteur pour une personne ayant eu un cancer, par exemple, le médecin-conseil ne peut accéder aux informations médicales que si vous avez donné votre accord formel.

Confidentialité des données médicales

Les données de santé bénéficient d’une protection renforcée. Elles ne peuvent être consultées que par des professionnels soumis au secret médical, comme le médecin-conseil de l’assureur. Les équipes commerciales, les gestionnaires de contrats ou les courtiers n’ont en principe aucun accès direct à ces informations.

En pratique, lorsque vous remplissez un questionnaire de santé, vos réponses sont transmises de manière sécurisée et traitées de manière confidentielle. Les décisions d’acceptation ou de refus doivent être motivées sans dévoiler le détail de votre état de santé à des personnes non habilitées.

Sécurisation des systèmes informatiques

Les assureurs doivent mettre en œuvre des mesures techniques et organisationnelles pour garantir la sécurité de vos données : chiffrement des communications, contrôle des accès, sauvegardes régulières, audits de sécurité, formation des collaborateurs… Ces obligations ne sont pas optionnelles : elles constituent un impératif légal.

En cas de violation de données (fuite, piratage, perte), l’assureur doit notifier l’incident à la CNIL dans les 72 heures et, si le risque pour vos droits et libertés est élevé, vous informer directement afin que vous puissiez prendre les mesures nécessaires (changement de mot de passe, surveillance de vos comptes bancaires, etc.).

Limitation de la durée de conservation

Vos données ne peuvent pas être conservées indéfiniment. Le RGPD impose aux assureurs de définir des durées de conservation proportionnées aux finalités poursuivies. Par exemple, les données relatives à un contrat d’assurance emprunteur doivent être supprimées deux ans après la fin du contrat, sauf si l’assureur doit les conserver plus longtemps pour répondre à une obligation légale ou traiter un litige.

Les données médicales, quant à elles, sont soumises à des règles encore plus strictes. Une fois le contrat résilié ou arrivé à échéance, elles doivent être effacées dans les délais légaux, généralement dix ans pour les dossiers sinistres, cinq ans pour les dossiers contentieux.

Que faire en cas de manquement

Malgré ces règles, il arrive que des assureurs ne respectent pas leurs obligations. Fuite de données, refus de vous communiquer vos informations, usage abusif de vos données à des fins commerciales, absence de réponse à vos demandes… Si vous constatez un manquement, plusieurs recours s’offrent à vous.

Étape 1 : Réclamation auprès de l’assureur

Commencez toujours par contacter le délégué à la protection des données (DPO) de votre compagnie. Expliquez clairement le problème rencontré et conservez une copie de votre courrier ou de votre email. Si vous n’obtenez pas de réponse satisfaisante sous un mois, passez à l’étape suivante.

Étape 2 : Signalement à la CNIL

La CNIL est l’autorité de contrôle française en matière de protection des données personnelles. Vous pouvez la saisir directement en ligne, via son site internet, en détaillant les faits et en joignant les pièces justificatives (correspondances avec l’assureur, copies de vos demandes, preuves du manquement).

La CNIL peut enquêter, demander des explications à l’assureur, et, si nécessaire, prononcer des sanctions : avertissement, mise en demeure, amende pouvant atteindre jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires annuel mondial de l’entreprise ou 20 millions d’euros. Ces sanctions ont un effet dissuasif majeur.

Étape 3 : Action en justice

Si le préjudice subi est important (divulgation de données médicales, utilisation frauduleuse de vos informations, atteinte à votre réputation), vous pouvez également engager une action en justice pour obtenir réparation. Les tribunaux peuvent condamner l’assureur à vous verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral ou matériel subi.

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En complément, si vous estimez que votre assureur a commis une faute dans la gestion de votre contrat ou dans le traitement de votre dossier, vous pouvez également solliciter le médiateur de l’assurance ou, en cas de refus d’assurance injustifié, saisir les dispositifs de recours prévus par la loi.

En résumé

À retenir
– Les assureurs collectent vos données pour évaluer les risques, tarifer les contrats, gérer les sinistres et prévenir la fraude.
– Le RGPD, la loi Informatique & Libertés et le Code des assurances encadrent strictement ces traitements.
– Vous disposez de droits opposables : accès, rectification, effacement, opposition et portabilité.
– Pour exercer vos droits, contactez le DPO de votre assureur, puis la CNIL en cas de non-réponse ou de litige.
– Les données médicales sont protégées par le secret professionnel et doivent être traitées de manière confidentielle.
– En cas de violation de données, l’assureur doit vous informer et notifier l’incident à la CNIL.

FAQ – Protection des données en assurance – RGPD

Sources & Méthodologie

Cet article s’appuie sur les textes officiels suivants : Règlement UE 2016/679 relatif à la protection des données personnelles (RGPD), Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés (modifiée en 2018), Code des assurances (articles L. 112-2 et suivants), publications de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL, www.cnil.fr), et guides pratiques de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Les informations présentées sont valables au 7 novembre 2025.

Les informations contenues dans cet article sont fournies à titre informatif et pédagogique. Elles ne constituent en aucun cas un conseil juridique personnalisé. Pour toute question spécifique à votre situation, nous vous recommandons de consulter un professionnel du droit ou de contacter directement la CNIL.

Par Clara Morel — Spécialiste assurance emprunteur.

Clara Morel

Clara Morel

Rédactrice spécialisée en assurance de prêt

J’aide les emprunteurs à comprendre leurs droits et à réduire le coût de leur assurance. Avec la Loi Lemoine, tout le monde peut résilier et choisir une meilleure couverture à tout moment. Mon rôle: traduire les textes légaux en explications claires, chiffrées et applicables.

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